L’imagerie ultrasonore pour les sciences cognitives

 
28/03/2019

Les chercheurs de l’Unité Physique pour la Médecine Paris de l’Ecole supérieure de Physique et Chimie Industrielles (ESPCI Paris, Université PSL, Inserm, CNRS) en collaboration avec des chercheurs de l’institut du cerveau et de la moelle épinière (APHP, Inserm, CNRS, Sorbonne Université) et des chercheurs de l’institut de la vision (Sorbonne Université, Inserm, CNRS) viennent d’accomplir une avancée majeure en étudiant le cerveau de primates lors de tâches cognitives complexes. Grâce à une méthode d’imagerie avec une très grande résolution spatiale et temporelle baptisée « fUS imaging » (pour functional ultrasound imaging), l’équipe est parvenue à imager l’activation de certaines régions du cerveau d’un primate réalisant diverses tâches visuelles et mieux encore : la sensibilité de la mesure permet de suivre la propagation de l’information dans le cerveau du primate. L’étude vient d’être publiée dans Nature Communications.

© Guillaume Murat - ESPCI Paris

Les méthodes de neuroimagerie ont bouleversé notre compréhension du cerveau au cours des vingt dernières années. Il est en effet devenu possible de suivre l’activité cérébrale et donc d’essayer de comprendre les mécanismes à l’œuvre dans le cerveau. Pourtant, les méthodes traditionnelles (IRM fonctionnelle ou électrophysiologie) sont lourdes, et nécessitent de moyenner les réponses obtenues sur un grand nombre d’acquisitions.
Les chercheurs de l’équipe Physique pour la Médecine Paris ont développé une technologie révolutionnaire d’une très grande sensibilité et d’une très grande résolution spatiale et temporelle. Jusqu’à présent utilisée pour étudier le cerveau au repos ou sa réponse à des stimuli somato-sensoriels simples, la technique « fUS imaging » a cette fois-ci été appliquée au suivi de tâches cognitives complexes. Les chercheurs ont ainsi mesuré, avec une résolution spatiale de 100 microns et sur des échelles de temps de 10 ms, la variation locale de flux sanguin dans une zone du cerveau d’un primate appelée champ oculaire supplémentaire (SEF), associée à la prise de décision en relation avec des règles apprises par l’animal.
En pratique, les primates réalisent une succession de mouvements du regard (suivre un point sur un écran, regarder à l’opposé d’un point…) pendant que leur activité cérébrale est cartographiée en temps réel avec un dispositif non invasif d’imagerie fonctionnelle ultrasonore.
A partir des variations de mesures du flux sanguin, les scientifiques sont parvenus à mesurer la tâche effectuée par l’animal , mais aussi à prédire son taux de réussite. Autre résultat notable : grâce à la résolution temporelle de la mesure, il a été possible de suivre la propagation de l’information entre différentes aires du cortex cérébral localisées à plusieurs centimètres de la surface du cerveau.
En fournissant une grande richesse de données via une technologie robuste et intégrée dans un instrument portatif, l’imagerie fonctionnelle ultrasonore devient dès aujourd’hui un puissant outil pour étudier les processus complexes de la cognition.

Imagerie fonctionnelle ultrasonore du cerveau de primate lors de tâches visuelles : variation du volume sanguin cérébral avant et pendant les réalisations de tâche.

Publication associée :

Alexandre Dizeux, Marc Gesnik, Harry Ahnine, Kevin Blaize, Fabrice Arcizet, Serge Picaud, José-Alain Sahel, Thomas Deffieux, Pierre Pouget, Mickael Tanter, Functional ultrasound imaging of the brain reveals propagation of task-related brain activity in behaving primates, Nature Communications 2019, doi:10.1038/s41467-019-09349-w

Ces travaux ont été réalisés avec le soutien du Conseil de Recherche Européen (ERC Advanced Grant FUSIMAGINE et ERC Synergy Grant HELMHOLTZ).

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